20/11/2024
Le Tribunal Judiciaire de Paris a récemment rendu un jugement (TJ Paris, 3e ch. 1re sect., 7 nov. 2024, n° 24/02849) qui aborde la question de la protection juridique du gameplay d’un jeu vidéo. L’affaire opposait la société Madbox, créatrice du jeu mobile « Pocket Champs », à la société Lava Games, accusée d’avoir copié le gameplay et l’apparence de ce jeu.
Bien que le tribunal ait rejeté les demandes de Madbox fondées sur le droit d’auteur, la concurrence déloyale et le parasitisme, il convient de nuancer cette décision et de ne pas conclure à une impossibilité totale de protéger le gameplay.
En matière de droit d’auteur, le tribunal a rappelé un principe fondamental : seule l’expression d’une idée est protégée, et non l’idée elle-même. Appliqué au cas d’espèce, le gameplay de « Pocket Champs », assimilé à un jeu de course « idle » avec un design épuré, reprend des éléments déjà existants dans l’univers du jeu vidéo. Le tribunal a notamment cité des jeux comme Mario Kart ou Fall Guys comme antériorité, concluant ainsi au manque d’originalité du jeu de Madbox et à l’absence de protection par le droit d’auteur.
Toutefois, il est important de préciser que la protection par le droit d’auteur reste envisageable si le gameplay présente une combinaison d’éléments suffisamment originale et créative.
Malgré la similitude des gameplays, le tribunal a rejeté l’argument de la concurrence déloyale. Il a considéré que les jeux présentaient des différences notables, notamment en ce qui concerne leurs noms, leurs éditeurs et leurs descriptions, excluant ainsi tout risque de confusion pour les consommateurs.
Ce point précis mérite d’être approfondi. Si le tribunal s’est focalisé sur les éléments distinctifs des jeux, il n’a pas suffisamment pris en compte l’expérience utilisateur. En effet, le joueur se concentre principalement sur le gameplay et l’apparence visuelle du jeu. Les éléments distinctifs tels que le nom ou l’éditeur ont un impact moindre sur son choix. Il est donc possible d’envisager une action en concurrence déloyale si la similitude des gameplays est telle qu’elle crée un risque de confusion chez les joueurs.
Le tribunal a également écarté le parasitisme, faute pour Madbox de démontrer l’existence d’une valeur économique individualisée dont Lava Games aurait indûment profité. Le jeu « Pocket Champs » a été considéré comme une simple combinaison d’éléments banals du jeu vidéo et d’une idée non appropriable : l’adaptation d’un jeu de type « idle » à un jeu de course.
La démonstration de l’existence d’une valeur économique individualisée est un point crucial en matière de parasitisme. Il est donc essentiel pour les développeurs de mettre en avant les investissements et les efforts consentis pour développer leur jeu et son gameplay.
Cette décision met en lumière la difficulté de protéger le gameplay d’un jeu vidéo, en particulier pour les jeux mobiles où les mécaniques de jeu sont souvent plus simples et s’appuient sur des concepts préexistants.
Face à ce constat, voici quelques conseils pour les développeurs soucieux de protéger leurs créations :
Conclusion :
La protection du gameplay est un enjeu majeur pour les développeurs de jeux vidéo. Bien que la décision du Tribunal Judiciaire de Paris rappelle les difficultés à protéger efficacement le gameplay, elle ne signifie pas pour autant qu’il est impossible de le faire. En suivant les conseils ci-dessus et en étant accompagné par un professionnel du droit, les développeurs peuvent mettre toutes les chances de leur côté pour protéger leurs créations.
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